Que signifient les pains de Chabbat (‘hallot)

halla

בָּרוּךְ אַתָּה יְהוָֹ-ה אֱלהֵינוּ מֶלֶךְ הָעולָם. הַמּוצִיא לֶחֶם מִן הָאָרֶץ

Bénis sois-tu, Éternel, notre D-ieu, Souverain du monde, qui fais sortir le pain de la terre.

Les ‘hallot (deux pains du Chabbat) représentent les deux portions de manne que les Hébreux recevaient le vendredi pendant la traversée du désert (ils avaient une double portion le vendredi car ils ne pouvaient pas en ramasser le samedi en raison du Chabbat).

Nos Sages ont lu le texte du livre de l’Exode interdisant d’effectuer un travail à chabbat (sous peine de mort!) (Ex 31, 14-17), en l’éclairant par le passage qui le suit immédiatement.

Ce dernier commente la construction du Tabernacle (le michkane d’un verbe qui signifie « demeurer », ou « tente de la rencontre »- ohel moed) au désert, indiquant les différentes mélekhet mahachevet (œuvres conscientes) utiles à sa construction et au fonctionnement du culte qu’on y rendait. on consacre le pain car il présente cette oeuvre de la semaine, du temps profane.

Les 39 travaux interdits (melakhot) sont structurés par ces travaux nécessaires à la construction du Tabernacle. Ils se répartissent en 3 catégories de 13 :
– les interdits concernant la fabrication de la nourriture : les pains de proposition dans le texte biblique ;
– les interdits concernant la confection de vêtements : le tissu qui recouvrait le tabernacle ;
– les interdits concernant la fabrication de la maison : de la charpente aux cordages de la tente, demeure de Dieu au désert.

Ces 3 catégories structurent le réel humain, notre habitation dans la vie. Elles concernent donc la vie (tout homme vit de pain), le vêtement, et la maison, c’est à dire les surfaces et les enveloppes de la sociabilité et de toutes les relations humaines. D’où la mitsva d’inviter ses amis, de consommer 3 repas, de faire l’amour, la sieste, de mettre des habits spéciaux…

L’interdit du battage du blé (dicha) concerne le fait de séparer une nourriture ou une graine de son enveloppe ou de son écorce. Il est étendu à des actes semblables comme presser un jus de fruit ou traire une vache. L’interdit ne porte donc pas sur un acte visible, extérieur, mais sur un principe de transformation significative du monde visant à créer. Il s’agit de prendre conscience de l’intention (kavana) qui sous-tend une action ou une succession d’actions en vue de créer.

On arrête de créer, d’être engendré par la succession des taches de la to do list de la semaine pour prendre conscience du temps, pour se rendre compte qu’il passe sur nous, que nous sommes créés. La mitsva est sanctification du temps, prise de conscience du temps et de sa plénitude donnée gratuitement. Nous pouvons « tuer le temps » dans l’addiction au réel (les courses du samedi) et c’est ce que signifie la « peine de mort » ou le sanctifier, prendre conscience de notre responsabilité pour le rendre sensé, vivant, humain.

Cette libération de la servitude du quotidien travaillé est mémorial de la création du monde et de la sortie d’Egypte. Le Chabbat est création de l’âme et libération de la servitude.

On prélève un morceau de la pâte (‘halla) selon la mitsva de la Torah « Quand vous mangerez du pain de ce pays, vous prélèverez un morceau [de pâte] pour l’Eternel. » (Nb 15, 17-21). La racine du mot ‘halla est ‘hol qui signifie ordinaire ou profane. On « sépare » le sacré du profane pour rendre au monde profane sa signification.

Le Midrach (Bamidbar Rabba 15) dit que la ‘halla est l’une des trois choses pour lesquelles D.ieu créa le monde.

Le Maharal de Prague dit que chaque homme est un microcosme lié au macrocosme cosmique, un mini-univers à lui tout sel. Le monde est composé de terre et d’eau. L’humain aussi est composé de terre-la farine, son corps, et d’eau : son âme. Chacun de nous est donc une pâte. En prélevant la ‘halla, nous sanctifions tout notre être.

C’est la mitsva essentielle avec l’allumage des bougies pour la femme dont le corps, selon nos sages a été créé parfait car il est rythmé par le temps de la lune.

La havadala (séparation, cloture) du chabbat finira par cette bénédiction :

Béni Tu es, Hachem, notre D. Roi de l’univers, qui distingues le sacré du profane, la lumière des ténèbres, Israël des autres peuples, le septième jour des six jours ouvrables, béni Tu es, Hachem, qui distingues le sacré du profane.

Baroukh Ata Ado-nay  élo-hénou mélèkh aholam hamavdil bein kodech lé’hol, ou bein Or Léhochekh oubein Israel Ia’amim ou bein yom hachévii léchéchèt yemei hamaasé. Baroukh ata Ado-nay hamavdil bein kodech léhol.

Il s’agit de séparer, distinguer (sanctifier en hébreu) pour y voir clair de manière distincte.

Si tu cesses de fouler aux pieds le Chabbat, de vaquer à tes affaires en ce jour qui m’est consacré, si tu considères le Chabbat comme un délice, la sainte journée de l’Éternel comme digne de respect, si tu le tiens en honneur en t’abstenant de suivre les voies ordinaires, de t’occuper de tes intérêts et d’en faire le sujet de tes entretiens, alors tu te délecteras dans le Seigneur et je te ferai dominer sur les hauteurs de la terre et jouir de l’héritage de ton ancêtre Jacob. C’est la bouche de l’Éternel qui l’a dit. (prière du kiddouch de Chabbat midi)

 

 

 

2 commentaires sur « Que signifient les pains de Chabbat (‘hallot) »

  1. Cher Meïr, je ne devrais pas poster ainsi un commentaire sur un blog un soir de Chabbat, mais j’ai juste envie de vous dire merci pour cet article que je lirai demain avant de réviser les quelques lettres d’hébreu que j’ai appris, et peut-être de travailler un peu le « tet »… Le Chema est bien intégré maintenant, bien que certains soir difficiles, j’aie un peu de mal à le dire encore… Étape suivante : Apprendre la bénédiction pour l’allumage des bougies de Chabbat… J’écoute un peu des pyoutim de votre blog en faisant la vaisselle, et au lit !

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