En construisant ma cabane…

Hier j’ai réalisé un surprenant rite venu du fond des âges. Un rite de berger nomade étrange pour qui connait le rejet biblique total de tout culte ou incantation idolâtrique de la nature et de ses forces. La Torah prescrit d’habiter dans des cabanes construites de feuillages et de bois pendant les sept jours de la fête de Souccot qui commence ce mercredi soir.  A l’époque du second Temple, le premier soir de Souccot, après la nuit, des fêtes se déroulaient sur l’esplanade du Temple, Il y avait beaucoup d’illuminations, spécialement dans la cour des femmes  il est écrit  dans la Mishna :

« qui n’a pas assisté à cette fête de l’eau [à Souccot] n’a jamais vu de réjouissances de toute sa vie ».

J’ai donc construit une cabane et me permets de vous livrer les quelques réflexions qui m’ont accompagné au cours de ce travail d’artisan.

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La fête de l’engrangement
De toutes les grandes fêtes juives, celle de Souccot, l’une des trois fêtes de pèlerinage, qui marque la récolte et la fin du cycle agricole annuel, est probablement la plus étrange pour un moderne. En effet cette « fête des tentes » ainsi que la décrit la Torah est celle de l’engrangement au même titre que Chavouot est celle des prémices des récoltes. On prend donc une partie des espèces produite par la nature (dont le cédrat) en cette année qu’on va séparer pour les particulariser, c’est à dire les sanctifier (kadosh en hébreu). Il s’agit par ce geste de rapporter TOUTE la récolte à son Créateur ultime de mettre en contact la terre et le Ciel, le cycle agraire qui rythme le temps et l’Éternel. Ainsi après la description de la fête des Azymes (Pessah, pâques)  le Torah ordonne : « la fête de la Moisson, fête des prémices de tes biens, que tu auras semés dans la terre; et la fête de l’Automne, au déclin de l’année, lorsque tu rentreras ta récolte des champs » (Ex 23, 16-17). Il s’agit de rapporter à D. sa création en en séparant d’une partie pour la sanctifier. Tout ce rite se déroule dans la cabane, la soucca.

Comme à Kippour on est déstabilisé dans notre corps par le jeûne, à Souccot la vie dans une soucca, une cabane, nous ramène à notre condition de passants vulnérables sur cette terre provisoire. Comme si la tradition juive prenait un malin plaisir à précariser des structures fondamentales du vivant pour mieux en transmettre la signification profonde.

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