J’ai retrouvé ce midi un grand ami : Olivier Sayadi avec qui je prenais des cours de Talmud au Centre-Communautaire il y a quelques années. Il a fait son alya et travaille à Jérusalem où il étudie en yeshiva.
Ceux que j’ai emmené dans le désert de Judée se rappellent de notre commentaire à deux voix à Qoumran la veille de Chavouot en mai 2010.
Qoumran vue du nord , au fond la Mer morte
(photo Antiquités Israéliennes)
Qoumran , une des grottes des manuscrits (à gauche):
une citerne -ou un bain de purification? (à droite)
(photo Didier Long, 18 mai 2010)
Les manuscrits qui ont été découverts, en 1947, sur la rive ouest de la mer Morte, n’ont pas encore livré tous leurs secrets. Ils avaient disparu depuis vingt siècles, et par chance beaucoup ont été retrouvés quasi intacts dans onze grottes perdues en plein désert au nord de Qumrân. Cette découverte pose la plus formidable énigme de l’histoire de l’archéologie. Tout a contribué à faire planer une ambiance d’hystérie aveuglante autour de la plus formidable découverte archéologique du XXème siècle : la rocambolesque découverte par des bédouins, le trafic des fragments de manuscrits par des antiquaires véreux, les services secrets manipulés, la soi-disant rétention de documents par des religieux… La divulgation au compte-goutte pendant trente ans des traductions supposées bloquées par le Vatican, des fouilles confidentielles et brouillonnes, les batailles de chercheurs, l’obscurité de ces textes… ajoutèrent un délicieux parfum de mystère et de complot défrayant régulièrement la chronique.
Car, parmi ces manuscrits se trouvent les plus anciens manuscrits que nous possédions de la Bible et des textes apocryphes. D’autres, inconnus jusqu’alors semblent en lutte prophétique avec certaines composantes du judaïsme d’avant 70, celui de l’époque de Hillel, Shammaï, Jésus.
La paternité des rouleaux rédigés entre le IIIe siècle avant notre ère et le Ier siècle fut immédiatement attribuée par le Père Roland de Vaux de l’Ecole Biblique de Jérusalem, aux esséniens qui auraient vécu à proximité à Qumrân. Ces moines juifs reclus dans une vie communautaire au désert « dans la compagnie des palmiers » si l’on en croit Pline l’Ancien, « ayant renoncé entièrement à l’amour (des femmes) » selon Flavius Josèphe, étaient forcément les auteurs des 823 manuscrits et les ruines de Qumrân découvertes par des fouilles, leur monastère.
Cette première hypothèse qui se stratifia pendant 60 ans dans les esprits comme une évidence de marbre laissait cependant de multiples questions irrésolues : comment ces manuscrits probablement déposés dans des grottes du désert s’étaient retrouvé là probablement au moment où la Xème légion romaine Fretensis qui venait de dévaster Jéricho se dirigeait vers Jérusalem pour en détruire le Temple en l’an 68 de notre ère ? Pourquoi certains manuscrits de peau, d’autres de papyrus ou plus étonnant, de cuir, étaient-ils conservés dans des jarres de terres fabriquées sur place alors que d’autres comme l’étrange rouleau de cuivre, sorte de carte au trésor, avaient été déposés à même le sol comme à la hâte ? Pourquoi trouvait-on plus de quatre cents graphies de scribes différentes alors que le lieu pouvait abriter tout au plus 35 à 50 personnes ? Pourquoi les phylactères retrouvés sur place contenaient-il tant de versions différentes des textes bibliques s’il s’agissait d’une seule secte d’unique doctrine? Pourquoi trouvait-on tant de vaisselle brisée dans les fouilles de Qumrân ? Les esséniens qui vivaient probablement sur les rives de la mer Morte au nord d’En-Gaddi, selon les historiens de l’époque étaient-ils réellement les scribes ou les dépositaires de ces manuscrits ? Lire la suite de « De Qoumran à Paris, retrouvailles »