« Civilisation du capitalisme », quels enjeux RH ?

Au cours de ce petit déjeuner, Didier Long présente la « Civilisation du capitalisme » d’où nous venons et pose les enjeux en termes de RH.

Duane Hanson, Man on Mower, 1995, sculpture. Un regard sur la middle class US

 Hypercapitalisme : la fin d’un monde ?
Didier Long débute par un résumé des 30 dernières années et la crise actuelle.
La crise de 2008 : « la faille dans la coque du Titanic » ? Tout un fonctionnement est remis en cause.
Trois leviers expliquent l’hypercapitalisme : l’émergence des nouvelles technologies, la globalisation, la dérèglementation.
Sans l’hyperconsommation l’hypercapitalisme ne fonctionnerait pas, ce qui pose la question de la responsabilité individuelle de chacun dans cette crise, la responsabilité de chacun de nous dans l’affaiblissement du politique depuis 30 ans. La crise du capitalisme est aussi une crise de la démocratie.
La classe moyenne a perdu de son pouvoir d’achat, l’endettement des ménages a augmenté construisant une gigantesque bulle pour stimuler la croissance qui ne peut plus être garantie que par les Etats : jusqu’à quand ?
La concurrence renforcée génère la montée des lobbyings, derniers leviers d’avantage concurrentiels et donc le détournement de l’intérêt général à des fins privées, cause de l’affaiblissement de la démocratie.
Les leviers traditionnels de la politique (nombreux militants, débats d’idées, partis intégrés à la vie de la cité) ont été remplacés par des opérations de marketing et de communication politique qui permettent de gagner les élections pour des partis qui représentent en tout 2% des citoyens électeurs (812 000 personnes pour 44M d’électeurs et 63M de français !).
Cette crise économique, politique, morale, oblige à se demander d’où nous venons et quelles sont les croyances du capitalisme ? Car les vrais leviers de l’hypercapitalisme sont en réalité religieux : ainsi la croyance en la dérégulation (Friedman), en la « raison financière » ou en la vertu intrinsèque des marchés pour générer le bonheur social ont fait illusion pendant 30 ans après l’échec communiste et la fin de la guerre froide mais ils sont aujourd’hui clairement compris comme des superstitions.

 

Le Prêteur et sa femme, Quentin METSYS, 1514, Flandres.

La Civilisation du capitalisme (Schumpeter) :  d’où venons-nous ?

Vers 800, c’est la création des premiers monastères, les premières « world companies », sociétés religieuses de production aux réseaux internationaux.
An 1000 : décollage économique de l’Europe le PIB par habitant revient à celui de l’empire romain en 1000 (400$/ habitant/an) et double entre 1000 et 1500 selon l’analyse longue d’Angus Maddison (OCDE 2001).
Les world companies de Cluny, mais surtout de Cîteaux seront les premières à fonder une économie sur une organisation rationnelle du travail et de la production. Cîteaux, contre la thésaurisation de Cluny, invente la frugalité économique et le réinvestissement perpétuel du capital sans en jouir, un mécanisme dont Weber affirmera qu’il est les leviers déterminants et distinctif de l’ « esprit du capitalisme », l’ attribuant à tort au seul protestantisme calviniste.
Le Moyen-âge, la chrétienté, est la première civilisation après l’empire gréco-romain qui fonde son énergie sur les énergies non humaines (inventions technologiques : collier d’épaule, énergie hydraulique et moulin eau …). Cette fin de l’esclavage est directement corrélée à la fin de l’empire romain (fin des trafics internationaux d’esclaves à bon marché) et à la christianisation de l’Europe (Duby) ) à partir du 7ème siècle. Lire la suite de « « Civilisation du capitalisme », quels enjeux RH ? »

Fréquence Protestante « Parcours sociologique »

Philippe Arondel recevait Didier Long ce samedi 09 janvier pour son livre Capitalisme et Christianisme, 2000 ans d’une tumultueuse histoire, de 17h15 à 18h  

>>> écouter l’émission

Les pierres sauvages

Le Thoronet

Un petit extrait pour donner envie de relire le magnifique ouvrage de Fernand Pouillon Les pierres Sauvages, (Seuil 1964), de circonstance en ce jours de frima.

 

 

 

 

 

 Dimanche de l’Oculi

La pluie a pénétré nos habits, le gel a durci le lourd tissu de nos coules, figé nos barbes, raidi nos membres. La boue a maculé nos mains, nos pieds et nos visages, le vent nous a recouverts de sable. Le mouvement de la marche ne balance plus les plis glacés sur nos corps décharnés. Emportés dans le crépuscule blafard d’un hiver de mistral, précédés de nos ombres démesurées, nous apparaissons tels trois saints de pierre. Nous marchons depuis des semaines. Par la vallée du Rhône nous atteignons Avignon, puis Notre-Dame-de-Florielle dans la diocèse de Fréjus, sur les terres de mon cousin Raymond Béranger, comte de Barcelone. En ce cinq mars onze cent soixante et un, trentième année de mon arrivée à Cîteaux,  je suis chargé de construire un monastère, j’en ai reçu l’ordre de notre abbé.

La prière d’un businessmoine… du XIème siècle

Je ne résiste pas au plaisir de vous transmettre ce petit texte d’un moine du XIème siècle (en cette veille de shabbat!) :

Allons, homme chétif !
il est temps de fuir un peu tes préoccupations.

Dérobe-toi, pour une fois, au tumulte de tes pensées,
Rejette à cette heure les soucis pesants
et remets à plus tard les affaires laborieuses.

Consacre à Dieu, ne serait-ce que pour une faible part,
ton activité, et repose-toi en Lui.

Descends dans le secret de ton âme, bannis-en toute chose

hormis Dieu et ce qui peut t’aider à le chercher,
et la porte close, cherche-le.

Anselme de Cantorbéry (1033-1109)