« Qui est un homme ?
– Celui qui a construit une maison, fait un enfant, et…planté un arbre »
Proverbe vigneron dans la famille de ma femme
On juge l’arbre à ses fruits
Tou Bichevat signifie «15 (du mois) de Chevat », il est qualifié de “Nouvel An des arbres » et correspond au moment de la montée de la sève dans l’arbre, avant le printemps.
Il est de coutume qu’un père plante un arbre avec son fils. Pourquoi ?
En différents endroits, la Torah compare l’homme à un arbre :
- Un homme est comme un arbre des champs… (Deut. 20, 19)
- Comme les jours des arbres seront les jours de mon peuple… (Isaïe 65, 22)
- Il sera tel un arbre planté au bord de l’eau… (Jérémie 17, 8)
et le Talmud explique : « Une personne dont la sagesse dépasse ses bonnes actions est comparée à un arbre dont les branches sont nombreuses, mais les racines clairsemées. Le vent souffle, le déracine et le retourne. Mais une personne dont les bonnes actions dépassent sa sagesse est comparée à un arbre dont les branches sont peu nombreuses, mais dont les racines sont nombreuses. Même si tous les vents du monde venaient à souffler, ils ne seraient pas en mesure de le faire chuter. » (Avot 3, 22). Et le premier psaume compare le juste à un « arbre planté près d’un cours d’eau qui donne du fruit en son temps et jamais son feuillage ne meurt ». Chacun sait que l’on reconnait un homme comme un arbre… à ses fruits. Devenir un homme c’est devenir une Torah vivante. La Torah est un arbre de vie pour ceux qui s’y attachent. (Proverbes 3, 18).
L’arbre dans le film « Le Sacrifice » d’Andreï Tarkovski
L’arbre c’est aussi le succession des générations, une anecdote talmudique raconte :
un vieil homme plantait un arbre. Un jeune homme passa par là et l’interrogea :
– Que plantez-vous ?
– Un caroubier, répondit le vieil homme.
– Imbécile, répliqua le jeune homme. Ne savez-vous pas qu’il faut soixante-dix ans avant que le caroubier ne produise de fruits ?
– Cela ne me dérange pas, répondit le vieil homme. De même que d’autres ont planté des arbres pour moi, j’en plante pour les générations futures.
De même que mes pères ont planté pour moi, je planterai pour mes enfants – T.B. Taanit 23a
Le cycle de la nature, la dîme, et le Nouvel an de l’arbre
On compte quatre fêtes de Nouvel an :
Le 1er Nissan est le Nouvel an pour le compte des années des rois et pour les fêtes de pèlerinage ;
Le 1er Eloul est le Nouvel An pour la dîme du bétail. Rabbi Éliézer et Rabbi Chimon le placent le 1er Tichri ;
Le 1er Tichri est le Nouvel an pour le compte des années, des années sabbatiques (shmitta), des jubilés (yovel), des plantations et des légumes ;
Le 1er Chevat est le Nouvel an pour l’arbre, selon l’école de Chamaï ; Et le 15 Chevat, selon l’école de Hillel.Talmud de Babylone, traité Roch Hachana 2a
D’après la loi biblique, il existe un cycle agricole de sept ans qui s’achève par l’année sabbatique, laChemitah. A l’époque du Temple la première, la seconde, la quatrième et la cinquième année de ce cycle, les paysans devaient prélever une seconde dîme de leur récolte et la consommer à Jérusalem. Cette dîme s’appelle Maasser Chéni, la Seconde Dîme. La première dîme étant constituée des dix pour cent qui sont donnés aux Lévite augmentés des deux pour cent qui doivent être données au Cohanim. Les troisième et sixième années du cycle, la seconde dîme est donnée aux pauvres qui pouvaient la consommer où bon leur semble.L’année sabbatique, aucune dîme n’est prélevée, tous les produits de la terre qui poussent cette année-là sont sans propriétaire et quiconque peut les prendre.
Le 15 Chevat détermine donc à quelle année appartient un fruit en fonction de sa date de floraison avant ou aprés Tou Bichevat, le Nouvel an des arbres.
Le Nouvel An des humains, mais aussi celui des céréales et des légumes ! commence lui, le 1er Tishri avec Rosh Hashana.
Si l’Egypte dépend des crues du Nil devenu le dieu Local (Pharaon rêve qu’il est « sur » le Nil, il le domine) Israël dépend de la pluie pour sa fertilité. Les nuages condensés sur la mer et poussés par le vent d’ouest font tomber la pluie sur les collines de Judée, le mont des Oliviers formant une barrière entre ce climat océanique et le désert. La pluie est donc vitale.
La saison des pluies commence à Souccot dans l’espace méditerranéen. Il faut ensuite environ quatre mois (depuis Souccot, le 15 Tichri, jusqu’au 15 Chevat) pour que les pluies de la nouvelle année saturent le sol et les arbres et produisent des fruits. Souccot est donc associée au don divin de la pluie. Selon la tradition rabbinique, à l’époque du Temple, la cérémonie de la libation d’eau se déroulait à Souccot.On puisait de l’eau à la source de Gihon qui était versée sur l’autel, afin d’obtenir la grâce divine pour les pluies. On voit à quel point le cycle agraire est celui des solennités du judaïsme. Le temps juifs comme la semaine se dirigent vers la liberté de l’année shabbatique. (Mishna Soucca 5, 1)
Le Seder de la terre d’Israël
Il est coutume de consommer des fruits ce jour-là, dans un certain ordre :
« Car l’Éternel, ton Dieu, te conduit dans un pays fortuné, un pays plein de cours d’eau, de sources et de torrents, qui s’épandent dans la vallée ou sur la montagne, un pays qui produit le froment et l’orge, le raisin, la figue et la grenade, l’olive huileuse et le miel; un pays où tu ne mangeras pas ton pain avec parcimonie, où tu ne manqueras de rien (Dt 8,8)
Voir aussi mon post de l’an dernier : « Tou BiChevat un avant goût de terre promise »