D’Athènes au Sinaï, histoire d’une conversion au judaisme.


La première montée à la Thora de Chmouel le lendemain.  (3ème en partant de la gauche)

Louis-Jean, Dominique de son nom de religion (catholique) pendant 20 ans, est devenu mercredi dernier Chmouel au Mikvé consistorial de Vitry où nous sommes passés de notre côté avec Rachel et Rivka il y a un an jour pour jour le lendemain.

Autant le chemin qui va du Mont Sinaï à Athènes ou Rome est un chemin fréquenté, autant le chemin qui remonte au Sinaï est un sentier relativement solitaire. Voici l’histoire d’une guyour (de guer, « étranger », ce qui sort de l’étranger, conversion au judaïsme).

Vééchiv lèv avot al banim, velèv banim al avotam
 » Et il fera retourner le cœur des pères vers les fils, et le cœur des fils vers leurs pères  »

(Malachie 3, 24)

Quelques lignes de son histoire que je n’ai apprise que récemment :

Louis-Jean a trouvé « Des noces éternelles, un moine à la synagogue » à la librairie du Temple à Paris il y a quelques années et il a mis des mots, sur ce qu’il vivait depuis. Il avait découvert par la généalogie, à l’âge de 14/15 ans ses racines juives lointaines côté paternel et avait connu un petit cousin de son père, polonais qui avait échappé à la mort grâce à son violon et avait vécu dans le ghetto de Varsovie. C’est ainsi que Louis-Jean est devenu musicien, organiste, violoniste. Il a étudié le solfège, le violoncelle, le chant et l’orgue au Conservatoire de sa ville natale.

Comme il me l’a dit : « Je fréquentais à l’époque assidument un libraire juif dont la librairie à malheureusement disparu. Il m’aurait vendu tout le contenu de sa librairie… Quand j’ai commencé à enseigner la musique, le directeur qui m’engageait m’a proposé de partir de la musique juive pour retracer l’histoire des musiques religieuses, pas de hasard, je me suis retrouvé à la bibliothèque de l’Alliance Israélite Universelle, depuis 16 ans maintenant j’enseigne toujours la musique juive qui a pris, petit à petit, de plus en plus de place… »

Voici ici ce qu’il dit du grand compositeur juif Gustav Mahler.

Je lui laisse la parole suite à son mikvé :

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Chers amies, amis,

Vous avez été nombreux à m’envoyer des messages de soutien, de sympathie, en suivant l’itinéraire de cette journée presque d’heure en heures… Ou tout simplement avoir pensé à ma démarche en ce jour… Soyez-en remerciés du fond du coeur. Je vous partage quelques impressions de ce moment unique. Mais les images se bousculent ! Mercredi après l’office du matin à la Synagogue de la Victoire, j’ai pris le chemin de Vitry-sur-Seine où j’avais rendez-vous avec le Beth Din pour le « mikvé », le bain rituel. J’ai vécu cela comme un voyage « initiatique », en solitaire, une sorte de traversée du désert mais pour arriver enfin en terre connue et promise. Ce moment tant attendu est à la fois le couronnement de cet itinéraire mais le début d’un nouveau chemin, d’une nouvelle vie. A mon arrivée au Centre communautaire une ambiance très conviviale régnait déjà, chargée de beaucoup d’émotion, rythmée de « Mazel tov », des familles remontaient du bain rituel avec leurs enfants, j’avais la réelle impression d’être dans une véritable « maternité », tout à fait inouï! Puis ce fut à mon tour de m’engager devant le Beth Din à respecter les mitsvoth de la Torah et de verser la goutte de sang de l’Alliance, la « Hatafat Dam Brit » qui authentifie la circoncision. Attendre encore… Puis mon nom a retenti une nouvelle fois, une douche, tenue d’« Adam arichone » et puis l’entrée dans la salle du mikvé, les trois immersions dans la position presque foetale pour être parfaitement immergé et les deux bénédictions d’usage toujours devant le Tribunal Rabbinique. Ce fut ensuite les larmes de la nouvelle naissance… Le mikvé ne serait-il pas à l’image du ventre maternel ? La porte de la vie, la pure rivière qui coulait dans ce Jardin du Paradis. On y entre sans rien, on y est vulnérable, abandonné mais pour renaître. Le mikvé, c’est tout d’un coup la Lumière. Le mikvé c’est l’unification de tout l’être, c’est aussi le signe du retour, de la « téchouva » vers notre Créateur. Un chemin pour retrouver notre état de perfection originelle ? En tout cas un moment unique comme celui de notre naissance ! Le Talmud nous l’affirme:

« Rabbi Yossi dit : Un juif converti est semblable à un enfant qui vient de naître » (TB Yebamote).

En s’habillant quelle joie de pouvoir revêtir pour la première fois le « tsitsit », les « franges » rituelles ainsi que quelques instants plus tard, dans la synagogue mettre les téfilines pour réciter le Chema et Minha.

Je vous partage le message que j’ai reçu d’une amie : « Un grand mazel tov et bienvenue parmi un peuple très vieux, un peu difficile à comprendre, qui a une histoire pas toujours drôle mais est cependant plein d’humour et d’auto-dérision, qui aime la discussion, qui pose toujours beaucoup de questions sur le monde et sur lui-même, qui peut être très généreux, très accueillant ou parfois pas du tout, qui est comme tout le monde et cependant pas tout à fait comme tout le monde, qui aime la vie plus que tout, bref, bienvenue parmi les Juifs ! »

Nous disons si justement cette bénédiction: « Béni soit D.ieu qui nous a fait vivre, exister et parvenir pour assister à cet instant ».

Très cordialement, Louis-Jean (Chmouël Ben Avraham)

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