LE SHABBAT, Josy Eisenberg : »La Source de vie », avec Gérard Haddad et Didier Long

Réécouter l’émission de Josy Eisenberg sur France 2 « La Source de Vie où Gérard Haddad et moi-même étions invités. C’est ici :

http://pluzz.francetv.fr/videos/source_de_vie_,95271425.html

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Extraits :

Josy Eisenberg : Selon la tradition juive, le Chabbat est un cadeau fait par Dieu au peuple d’Israël par le truchement de Moïse. En effet, dans la prière du Chabbat, on dit « Moïse, le serviteur fidèle, se réjouit du cadeau « que Dieu lui a donné lorsqu’il était sur le mont Sinaï, à savoir le Chabbat.
Pour parler du Chabbat, ce jour essentiel dans la piété juive, j’ai le plaisir de recevoir  Gérard Haddad, psychanalyste et Didier Long, ancien bénédictin, qui ont publié ensemble un livre sur le Chabbat, « Tu  sanctifieras le jour du repos » paru aux Editions Salvator. Je ne vais pas vous demander pourquoi vous avez écrit un livre C’est un peu naturel pour un juif.

Gérard Haddad :  Pas si naturel que ça. J’ai été entraîné par mon ami Didier Long !…[…]

Gérard Haddad :  C’était très mal vu dans l’Antiquité. Les Grecs disaient « Un jour par semaine, ils ne fichent rien ! »Des paresseux! Les écrivains romains, latins, ont beaucoup traité les juifs de paresseux. « S’arrêter une fois par semaine ? »-« C’est pas rentable ! ». C’est un jour où on a proclamé ce qui était une hérésie dans l’Empire romain. Les juifs étaient diabolisés comme paresseux et persécutés. C’est un jour d’égalité où il n’y a plus ni patrons ni domestiques.

Josy Eisenberg : Aujourd’hui, la CGT descendrait dans la rue…

Gérard Haddad : « Tripalium » , c’est la torture. Le mot tripalium va donner le mot « travail ». Ce tripalium, un jour par semaine, il s’arrête. Et nous sommes appelés a un travail d’esprit.

La Torah a inventé la semaine de 7 jours. Ça ne fait pas de doute. Ça a été reconnu. Un livre a été écrit par un ami musulman, Ali Magoudi, sur le temps. Et il dit « La notion de sept est une invention juive. »-C’est drôle, ça paraît…tellement naturel! Nous vivons là-dedans. Et puis ça devient 7 fois 7. Ça fait Chavouot. Il y a les 7 années, les 7 fois 7 années. Tout le temps est structuré. Et aussi l’espace. Un jour par semaine sans rien faire, c’était la première loi sociale, le Chabbat! Le chabbat est une bombe à retardement qui va, avec les siècles, faire exploser le système esclavagiste, petit à petit. Le Chabbat a été une brisure dans le système ancien du discours du maître, pour parler comme Lacan.

Didier Long : Historiquement, le chabbat est né au moment de l’exil à Babylone (en -597). Privée de son temple, l’identité juive va se structurer autour du temps. Comme dit Abraham Heschel (Les bâtisseurs du temps), privé de lieu physique, les juifs ont structuré le temps et l’ont sanctifié. Après la destruction du Temple en l’an 70 toute la liturgie du Temple de Jérusalem a été transférée dans l’office du Chabbat à la synagogue vers le « sacrifice des lèvres ». […]

 J’ai rencontré une communauté assez formidable de gens. Fabrice, Alexis, Gaston, Ronny, tous ces gens qui se reconnaîtront. Une petite communauté d’une vingtaine de personnes, sépharades, avec ce rabbin, Haïm Harboun, qui venait du Mellah de Marrackech. Petit à petit, je suis rentré là-dedans.

Je suis rentré dans la pratique du Chabbat. Et à ce moment, j’ai relu les évangiles complètement autrement, le Nouveau Testament. Et  je me suis aperçu que les chrétiens, dans les textes, les pères de l’Eglise, dans la partie orientale de l’Empire romain et dans tout l’espace Parthe qui est l’Iran actuel, les judéo-chrétiens avaient pratiqué le Chabbat au moins jusqu’au 5e siècle. Ça m’a fortement étonné. Je me suis dit « Pourquoi on fête le dimanche ? « Comment est-on passés du samedi, du Chabbat au dimanche ? »

Dans la liturgie du Chabbat, l’office du matin, on dit « Chabbat vayinafash ». On traduit souvent « Le 7e jour, il s’est reposé. »Il faudrait traduire « Le septième jour il a retrouvé son âme » s’arrêter de travailler; Comme me l’a dit le rabbin Haïm Harboun vayinafash vient de »Nefesh », l’âme :  » le septième jour, on retrouve son âme ». Le fait de s’arrêter permet d’ouvrir un espace de liberté où on retrouve, on découvre qui on est véritablement. On ouvre un espace de liberté après une semaine de servitude. On décide de sanctifier ce jour pour vivre dans la liberté. Notre condition originaire est une condition d’homme libre. C’est une immense invention juive pour toute l’humanité.

9 commentaires sur « LE SHABBAT, Josy Eisenberg : »La Source de vie », avec Gérard Haddad et Didier Long »

  1. Shalom, bonne semaine,
    Merci d’avoir encore offert ta parole. Elle éclaire la vérité. Rabbi Haïm est ton  » père. » Il est aussi le mien, il le sait, même si j’ose rarement le questionner. Il m’a permis de chanter avec lui. Heureux souvenir qui se maintient, notamment, grâce à toi qui permets d’écouter ces chants.
     » Nostalgie  » du Shabbat, certes, mais joie du Shabbat, aussi. Pour moi qui me vis chrétien, accessoirement catholique, petit-fils d’un protestant tiède, la rencontre réitérée avec Yéoshouah nourrit ma vie, au point de la justifier. Le bonheur de se retrouver en famille, en communauté, se suscite, se provoque : il faut le vouloir, le désirer, y prendre plaisir.
    Alors, j’ai joie à vivre Shabbat, parmi les miens : il me manque, le plus souvent, mes frères et soeurs de la souche de Haïm. Je les vois bientôt, c’est une grande joie.
    Pour  » garder le feu,  » j’ai, chez moi, un crucifix sans cadavre, une Ménorah, une coupe kiddouch, un shofar, …
    Notre rencontre, lors du mariage d’Ari et Mégane, me laisse en appétit à te parler davantage.
    Que l’Unique te Bénisse.

    Iodresh

  2. Magnifique émission que je regarde chaque dimanche depuis plus ou moins trente ans avec grand intérêt sur France 2. Malheureusement, en Belgique, nous ne savons plus la revoir sur internet. Les droits de diffusion ne sont pas donnés. Que pouvons nous faire ou aller revoir ces magnifiques émissions ?
    Bravo et Merci – Tenez bon.
    Amicalement

  3. Bonjour, Nous avons déjà eu le plaisir de dialoguer sur internet… et cela a été pour moi une heureuse surprise de vous retrouver à l’improviste ce dimanche dans l’émission juive. Mon livre rejoint « le club » judéo-chrétien » par un autre biais ! (« Interroger sa foi. Du calvinisme au judéo-christianisme libéral ». Préface du pasteur Pierre-Jean Ruff. Edilivre. sept. 2013.) Une recension dans le journal catholique conservant le souvenir du grand personnage que fut Marcel Légaut : « Quelques Nouvelles » de déc. 2013 : « Une lecture agréable ». Voir aussi la recension d’ « Actualités Unitariennes », de Jean-Claude Barbier…etc…Pour moi, je suis attachée au très grand prophète Jésus -uniquement homme, pourtant- qui a élargi à l’infini le message d’amour de Dieu ; je me sens juive en reconnaissant l’entière judaïté de Jésus, et en ayant rejeté la Trinité. Les Juifs me semblent d’abord proches intellectuellement des chrétiens unitariens, ensuite des protestants libéraux, et enfin des catholiques (bien que je ne doute pas qu’en douce il y ait bien des catholiques progressistes non officiellement déclarés !!!!)
    Très cordialement.

  4. Bonjour cher ami,
    Je vous ai regardé ce matin à l’émission de Josy Eisinberg. Je ne vous connaissais pas. J’ai eu un parcours qui vous ressemble un peu. Je me suis convertie au judaïsme grâce à Haim Harboun qui était rabbin à Versailles. J’ai passé plusieurs années à prendre des cours avec des rabbins et je suis passée par le consistoire de Paris. J’ai écrit aussi un livre l’homme dévoilé en faisant un parallèle entre les dieux grecs et la genèse biblique et à la suite de ce travail, je suis devenue amie avec André Chouraqui. Cela m’a fait plaisir de vous voir et pour l’anecdote je fais chaque année une retraite dans un monastère bénédiction
    Merci beaucoup d’être que la lumière vous accompagne.
    De tout cœur
    Francoise Bitton

  5. J’ai oublié de vous dire que c’est Haim Harboun qui m’a marié à Versailles en 1979 c’était un ami de mon beau frère
    Merci beaucoup de m’avoir rappelé ce souvenir. Je suis fière de ma démarche. Je pense avoir l’âme juive incarnée dans un corps de chrétienne

  6. Cher Didier, peut-être un jour avez vous connu le bonheur d’entendre quelqu’un décrire ce que vous ressentiez au plus profond de vous. Eh bien tel fut mon sentiment en vous suivant ce dimanche 19 janvier : le cheminement « logique » vers le judaïsme explicité par quelqu’un ayant votre parcours lorsque l’on a la même réflexion, c’est plus que de la simple joie, c’est la confirmation d’être sur la bonne route. La difficile route du « גר תושב », je la pratique dans ma synagogue depuis 2 ans (mais sans talit), elle est belle mais parsemée d’embûches. Je sais désormais que d’autres l’empruntent et qu’il faut continuer. Cordial shalom.
    תודה רבה לך לזמן ההוא

  7. Didier,
    Tu cites :  » le septième jour, on retrouve son âme.  » Ceci me conduit à préciser :  » au moins …  » En effet, il est possible de rendre ces retrouvailles toutes proches. Ce peut être difficile. Mais  » ora et labora !  » (comment traduis-tu cela en hébreu ?) : me vêtir d’oraison, en arrivant au travail, me rend tout aussi disponible que lucide. Arrêter, toutes les trois heures de la journée  » active,  » pour confier à La  » Conduite  » de L’Unique-Très-Haut, pendant quelques minutes, toutes celles et ceux dont je partage la mission et les objectifs, me donne une force, un Shalom, une joie, qui m’encouragent à poursuivre : je deviens un  » drogué  » de L’Eternel, à fond dans un boulot relativisé et maîtrisé. Heureusement, Il Prend Soin de moi et, parfois, j’oublie. Alors je besogne. Et, oui, il faut que j’entre, alors, en Shabbat pour me re-poser dans Son  » Ombre Éblouissante.  »
    Comprenne qui veut,

    Shalom à tous,

    Iodresh

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