Vivre et mourir en juif à Venise à l’arrivée de Bonaparte

Le Ghetto de Venise

Au 16 ème siècle les juifs sont partout en Italie. Ils vivent dans les villes d’où ils sont régulièrement expulsés. C’est l’Inquisition qui va lancer les ghettos. Il faut absolument éviter que les juifs qui affluent d’Espagne suite à l’expulsion de 1492 ne se mêlent pas à la population des baptisés. Les badges jaunes qui les marquent et les chapeaux pointus ne suffisent plus.

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Mais les juifs sont de bons médecins et surtout des commerçants internationaux puisque leurs familles ont été expulsées vers les port du Levant, du Maghreb ou de Turquie… les notables des villes d’Italie ne veulent donc pas les expulser. Donc après un débat houleux, le 25 janvier 1516, le Sénat de Venise proclame que l’ancienne forge surnommé ghetto (ghet(t)are, « jeter » , car on « jetait » les barbes des fonderies des canons en cuivre) sera le quartier fermé des juifs. Le couvre-feu est proclamé : « afin qu’ils ne circulent pas toute la nuit, nous décrétons la fermeture à minuit des deux portes de ce quartier, par des gardiens appointés par les juifs. »

Le Ghetto répond donc à une double contrainte : garder les juifs mais les séparer.

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Venise a toujours été une ville multiethnique entre l’Orient et l’Occident, les pays d’Europe et les Turcs de l’Empire ottoman. Toute la diaspora est donc là avec des synagogues pour chaque rite : La Scola Spagnola pour les Sépharades réfugiés d’Espagne et du Portugal, Scola Grande Tudesca pour le juifs venus d’Allemagne et d’Europe centrale, la Scola Canton pour les français, La Scola levantina pour les Levantins réfugiés de Constantinople… On y parlait de multiples langues et dialectes.

La seule liste des créations des ghettos raconte la pénétration des Juifs dans les villes et villages de la société italienne : Venise-1516, Rome-1555, Gênes-1560, Sienne-1571, Florence-1571, Mirandola-1602, Vérone-1602, Padoue-1603, Mantoue-1613, Ferrare-1624, Modène-1638, Urbino, Pesaro, Senigallia-1634, Este -1660, Feggio, Emilia-1670…. Paradoxalement, avec la création des ghettos qui les rejettent, les Juifs s’inscrivent dans la topographie des cités, partout.

Bonaparte à Venise

Le 9 février 1797 Bonaparte pénètre dans le ghetto d’Ancône. Il ordonne d’enlever aux juifs le bonnet jaune et le brassard et d’y substituer…  la cocarde tricolore.

Bonaparte avait dit : « Je serai un Attila pour Venise. », il tint promesse. Le 12 mai 1797 le jeune homme de 28 ans entre dans Venise : il décrète la fin de la République (697-1797), pile la Sérénissime, détruit de nombreux couvents, réaménage la cité en détruisant des églises, envoie au Louvre nombre d’œuvres historiques dont les fameux chevaux de la place Saint-Marc.

Capture

Napoléon Bonaparte avec des députés de Venise, 1797

Ce que Bonaparte a aboli… les anciens régimes vont le restaurer. Le Ghetto est rétabli par les Autrichiens en 1804. Il faudra attendre la libération de Venise et son rattachement au jeune royaume d’Italie en 1866 pour que le ghetto soit supprimé.

Voici quelques tableaux de la vie juive à Venise vers 1780 juste avant que Bonaparte, le petit général Corse ne débarque. Ils sont de Marco Marcuola (1740-1793) au Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme (Paris).

Circoncision

Circoncision à Venise, vers 1780, Marco Marcuola. (MAHJ)

mariage

Mariage juif à Venise, vers 1780, Marco Marcuola. (MAHJ)

Procession funéraire

Procession funéraire juive à Venise, vers 1780, Marco Marcuola. (MAHJ)

Funérailles

Funérailles juives à Venise, vers 1780, Marco Marcuola. (MAHJ)

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