Hiloula de Rabbi Méïr, 14 Mai 2014 – 14 Iyar 5774

Tombe de Rabbi Méïr au bord du Lac de Tibériade
Tombe de Rabbi Méïr au bord du Lac de Tibériade

Cette article est dédié au rav Haïm Illouz (zal), à son épouse et à tous ses enfants.

Rabbi Meïr (רבי מאיר)

Rabbi Méïr est un des docteurs de la Mishna les plus éminents de la quatrième génération (second siècle). Grande figure spirituelle après la révolte de Bar Kokhba (132-135). On le nomme également Meïr baal Haness (le maître du miracle). Rabbi Méïr était fils de convertis, comme le furent aussi Chmaya et Avtalion, ainsi que Rabbi Akiva son maître. Rabbi Méïr fut le témoin de l’assassinat et du martyre des justes de son temps. Il  les romains lacérer le corps de son maître Rabbi Akiba avec des peignes de fer ; comment Yéhouda Ben Bara  fut tué, comment Rabbi Hananya Ben Téradion fut condamné par les romains à être brûlé vif. Berouria, fille ainée de Rabbi Hananya Ben Téradion devint la femme de Rabbi Méir. Elle est présentée par le Talmud comme une femme savante assise au milieu des Sages.

La Hiloula

Le terme Hiloula est utilisé pour désigner le jour anniversaire du décès d’un Tsadik (juste) . « Hiloula » est lié au mot « Hallel », qui signifie louange. On rappelle son Avodat Hachem (service de D.ieu), ses actions, ses midot (traits de caractères), son amour infini pour les créatures de D.ieu et surtout sa proximité avec l’Eternel et ses miracles. Rabbi Chimon bar Yo’haï, le jour où il quitta ce monde, demanda à ses disciples de considérer cette date comme « le jour de ma joie ». La tradition juive veut que le jour de la Hiloula, les juifs affluent sur la tombe du Juste, parfois ils y dansent et prient. Des chants, des piyoutim sont entonnés en son honneur et de nombreux cierges et des veilleuses à l’huile sont allumés. Candle Lors des prières du jour de Kippour, les fidèles prononcent plusieurs fois « Dieu de Rabbi Méïr, exauce-nous ! ». Pourquoi ?

« Dieu de Rabbi Meir sauve-moi ! »

Le Talmud de Babylone, Traité Avoda Zara, dans sa page 18a rapporte une hagadah, une histoire. Brouria (la femme de Rabbi Méïr et une grande savante) accepte le décret impérial de mise à mort de son père et sa mère, mais refuse la situation de sa sœur, arrêtée et placée dans un lieu de prostitution. Brouria interpelle Rabbi Méïr et lui demande de la délivrer de ce lieu. Rabbi Méïr prend un tarkab de dinars, se déguise en cavalier romain et tente de séduire sa belle-sœur. Elle lui répond : « j’ai mes règles ». Rabbi Méïr insiste et rétorque qu’il attendra. Mais elle le repousse en usant de différents arguments. Rabbi Méïr comprend alors qu’elle est restée droite et pure. Rabbi Méïr s’adresse alors au gardien de l’endroit et lui donne de l’or pour délivrer sa belle-sœur. Le gardien lui rétorque : « Que ferai-je lorsque les pièces d’or auront été utilisées ? Comment pourrai-je me faire accepter auprès de mes supérieurs ? » Rabbi Méïr lui dit alors : « Invoque le Dieu de Rabbi Méïr en disant ‘Dieu de Méïr, réponds-moi’ et tu seras sauvé ». Rabbi Méïr arrive à le convaincre en lui faisant la démonstration de la pertinence de ses propos. Quelques jours après la libération, les faits ont été rapportés aux autorités, et le gardien dénoncé. Condamné à mort par pendaison, le gardien murmure alors : « Dieu de Méïr, réponds-moi » lorsqu’on le place sur la potence. Brutalement, la poutre de la potence tombe et le gardien est sain et sauf.

Berouria

Berouria, la femme de Rabbi Méïr  lui dit: « Pourquoi pries-tu dans un but qui les conduira à leur perte, est-ce à cause du verset que tu as appris « les péchés cesseront à la surface de la terre? » Il n’est pas marqué « les pécheurs », mais « les péchés », de plus, consulte la suite du verset: « et il n’y a plus de mécréants ». Comme il n’y a plus de péchés, il n’y a plus de pécheurs. C’est pourquoi, il vaut mieux que tu invoques la miséricorde afin qu’ils se repentent de leurs mauvaises actions et ainsi disparaîtront leurs mauvaises passions. Alors se réalisera le verset: « et il n’y a plus de méchants ». » Les paroles de Bérouria impressionnèrent Rabbi Méïr qui changea la conduite à adopter et implora la miséricorde sur ses voisins, afin qu’ils cessent leurs péchés et qu’ils fassent téshouva. Ainsi en fut-il. Les voyous devinrent de vrais repentis. (TB Bérakhot 10)

Le disciple de rabbi Akiba

Rabbi Akiva avait 24000 élèves, les uns plus érudits en Torah que les autres. Ces étudiants périrent au cours des 33 premiers jours du ‘Omer, parce qu’ils ne se témoignaient pas de « respect mutuel ». Rabbi Akiva restaura l’étude avec 5 restant : Rabbi Chimon Bar ‘Yo’haï, Rabbi Meïr Baal Haness, Rabbi Yossi, Rabbi Né’hémia et Rabbi Yéhouda.

Le Talmud, dans le traité Guittin (p138) raconte l’histoire suivante : l’empereur romain avait dépêché Néron pour détruire Jérusalem. Lorsqu’il arriva à proximité de la ville, il voulut interroger le sort pour savoir si cela lui serait possible. Que fit-il ? Il lança une flèche du côté de l’est, et elle tomba sur Jérusalem; il en fut de même pour les 4 points cardinaux : toutes tombèrent sur Jérusalem. Il comprit ainsi qu’il réussirait dans son entreprise. Toutefois, il se dit : « Le Saint béni Soit-Il désire détruire son sanctuaire, mais Il me punira ensuite pour cela … » Il prit la fuite et se convertit au Judaïsme; Rabbi Meïr fut l’un de ses descendants.

Nos Sages disent que le véritable nom de Rabbi Meïr était en fait « Rabbi Néhouraï », mais on l’appelait Rabbi Meïr parce qu’il éclairait les sages dans le domaine de la Halakha. Cependant, nous constatons que la Halakha n’a pas été fixée selon son opinion. Pourquoi ? Répondent nos Sages, il avait la possibilité de dire d’une chose présumée impure qu’elle était pure et de le prouver, et vice et versa. (Erouvin, 138).

Ravina disait de lui : « Lorsqu’on voit Rabbi Meïr au Beth-Hamidrach, on a l’impression qu’il déracine des montagnes et les broie … »

Rabbi Meïr a eu deux fils qui moururent de son vivant. Il fut également témoin de l’assassinat et du martyre des justes de son temps. Il vit comment les romains lacérèrent le corps de son maître Rabbi Akiva, avec des peignes de fer, comment Rabbi Yéhouda Ben Baba fut tué, comment Rabbi ‘Hanania Ben Téradyone, qui rassemblait les foules et leur enseignait la Torah, fut condamné par les romains à être brûlé vif. Brouria, la fille ainée de Rabbi ‘Hanania Ben Téradyone devint la femme de Rabbi Meïr.

Rabbi Meïr donnait un cours au Beth-Hamidrach tous les vendredi soir. Une femme avait l’habitude de venir écouter son cours. Il arriva une fois que Rabbi Meïr s’étendit sur son sujet, et quand la femme retourna chez elle, les bougies de Chabbat étaient déjà éteintes. 
Son mari l’interrogea : « Où étais-tu ? »
« J’écoutais le discours de Rabbi Meïr » répondit-elle. 
« Eh bien », dit le mari, « tu ne rentreras pas avant d’aller cracher au visage de ce bavard. » 
Rabbi Meïr, dans son esprit prophétique le sut; il fit semblant d’avoir mal à l’oeil et demanda si une femme dans l’assemblée connaissait les murmures pour guérir et vienne pour le soulager (les murmures s’accompagnaient de crachats).
Cette femme se présenta.
« Sais-tu murmurer les formules pour les yeux ? »
« Non » fut la réponse. Rabbi Meïr lui recommanda alors de lui cracher 7 fois au visage. Il lui dit alors : « Ton mari t’a ordonné de me cracher une fois au visage, tu lui diras que tu as craché 7 fois. » Ses élèves s’insurgèrent : « Nous aurions pu faire venir ce mari et lui infliger la flagellation, jusqu’à ce qu’il se réconcilie avec sa femme. »
« Mon honneur est-il plus cher que celui du Créateur ? » répondit Rabbi Meïr. « Le Nom ineffable qui a été écrit sur le parchemin doit être effacé dans l’eau afin de ramener la paix entre un homme et son épouse. Le nom de Meïr ne doit-il pas s’effacer à plus forte raison ?! »

Le disciple d’Elicha Ben Abouya

Elicha ben Abouya fut l’un des maîtres de Rabbi Meïr. Son génie était vaste et profond, mais il abandonna la foi. Son père, Abouya, était un des plus riches propriétaires fonciers en Israël. L’enfant d’Abouya qui reçut le prénom d’Elicha, montra dès son jeune âge des dispositions remarquables pour l’étude.
A un âge encore jeune, il égalait déjà ses professeurs. L’étude ordinaire de la Loi ne suffisait plus à son ardeur; il se porta sur la métaphysique. Une fois, alors qu’il étudiait la Torah dans la vallée de Guinossar, Elicha vit un homme grimper à la cime d’un palmier pour y attraper des oiseaux. La Torah interdit de prendre ensemble la mère et les oisillons. Il faut d’abord renvoyer la mère. La Torah dit au sujet de celui qui fait cette Mitsva : « Afin que tes jours se prolongent. » Il vit l’homme appliquer intégralement la Mitsva en renvoyant d’abord la mère; mais en redescendant, il fut mordu par un serpent et mourut ! Elicha se dit : « Où est la longue vie qu’il était sensé vivre ? » 
En voyant cela, il devint hérétique; on l’appela alors A’her, l’autre. En réalité, ces promesses de bonheur et de longévité ne peuvent se rapporter qu’à l’existence de l’âme dans le monde futur. Nos sages font la différence entre l’usufruit de la récompense d’une mitsva dont on bénéficie dans ce monde et le « capital » réservé pour le monde futur.  Rabbi Meïr continua malgré tout d’étudier auprès d’A’her. En Erets Israël, on disait : 
Rabbi Meïr a mangé la datte et rejeté le noyau. Et Rabba d’expliquer : « Pourquoi les sages sont-ils comparés à des noix ? C’est que les noix, même si la coquille est pleine de boue, ce qui est à l’intérieur reste propre. » Il en est de même pour un Sage; même si un sage s’est avili, son enseignement ne perd pas de sa valeur. » A’her tomba malade et dut s’aliter. Rabbi Meïr alla lui rendre visite et le trouva très malade. « Si je me repens à présent que je suis très malade, mon repentir sera-t-il accepté ? »
« Même lorsque l’âme d’un homme est vacillante, son repentir est encore accepté » répondit Rabbi Meïr. A ce moment, Elicha se mit à pleurer et rendit son âme.

Rabbi Meïr, fidèle à son maître dit : « Après ma mort, j’intercéderai pour lui et j’obtiendrai son pardon définitif; ce jour-là, une flamme sortira de la tombe d’A’her. » C’est effectivement ce qui se passa le jour de la mort de Rabbi Meïr.
Cependant Rabbi Yo’hanan dit : « Quel est cet exploit d’avoir réussi à faire consumer son maître par le feu ? » Il ajouta : « Quand mourrai-je pour éliminer cette fumée qui s’échappe de sa tombe ? » Quand Rabbi Yo’hanan quitta ce monde, il n’y eut plus de fumée sur la tombe d’A’her. bougies
Rabbi Meïr dut s’enfuir d’Erets Israël et il mourut en Asie mais il dit à ses disciples :
« Vous mettrez mon cercueil au bord de la mer, du côté de la Terre Sainte, afin que les passants s’écrient : Ici repose l’homme que des paroles haineuses ont chassé du pays. » Etant parti en exil, il voulait du moins n’être séparé de cette Terre qu’il avait tant aimé que par les vagues de la mer.

Il mourut le 14 Iyar. Ses dernières volontés furent exécutées : son cercueil fut ramené plus tard à Tibériade, et il fut enterré à proximité du lac de Tibériade. 03 BeitMeir - 1

Synagogue de Bastia

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